mercredi 5 août 2009

Moderato Cantabile



Marguerite DURAS, "Moderato Cantabile", Les Editions de Minuit, 1958, collection 10/18




Vous le savez bien, n’est-ce pas, que ce blog, je ne m’en sers que pour partager les lectures qui m’ont plu ? Et que je n’ai ni l’envie ni le temps d’écrire de longs textes ampoulés ? Je pense à vous, au blog, quand je lis ; de plus en plus je le fais. Ainsi, c’est un peu comme si je vous emmenais partout. Aujourd’hui, mon mari avait enfilé son pantalon camouflage et son horrible casquette rouge, et quand ça lui prend, ça veut dire « En avant marche ! On va promener, je vous donne 15 minutes, j’attends dans la voiture. » Une demi-heure plus tard, on sillonnait les routes, direction le domaine provincial de Chevetogne. Il devait y avoir au moins 26°. C’était une de ces rares journées où l’été en Belgique exhibe ses vertus et nous aide à oublier la grisaille. Le ciel était bleu et les nuages pratiquement inexistants. Ce domaine, il est gigantesque, arboré, verdoyant. Partout où on regarde, il y a des points d’eau, des canards, des sentiers, des rhinocéros en pierre, des licornes en paille et des fleurs, des plaines de jeux aussi et des piscines. Parfois, on voit passer des chevaux au grand galop… Entre deux activités, on est allés se restaurer à une terrasse. Une vingtaine de sandwiches svp et 4 bouteilles d’eau bien fraîche… On était bien, on était à l’ombre. À côté de nous, une petite fontaine où les enfants trempaient leurs pieds nus. J’avais le temps et quelques livres dans mon sac. Je choisis « Moderato canatabile ». Il est court, il est bien, je l’avais déjà lu, il y a plus de dix ans.





Marguerite Duras, j’aime bien, l’ambiance étouffée-étouffante de ses histoires, ses personnages solitaires enfermés dans leur mélancolie et, toujours, cette impression qu’ils attendent quelque chose, qui ne vient jamais… l’amour bien sûr et tous les espoirs qui tourbillonnent autour, l’amour impossible donc et forcément parce qu’on est « chez Duras », dans des dialogues qui n’en finissent pas de ne rien dire ou de faire croire que rien ne se dit et pourtant… L’amour, disions-nous, et ses silences, et ses pouvoirs. Les personnages durassiens veulent aimer, tous ils le veulent mais il y a toujours la vie pour les en empêcher, la mélancolie, le désarroi, la tristesse.


Ici, on a une femme, Anne Desbaresdes, que rien ne semble retenir, sauf l’amour inconditionnel qu’elle porte à son petit garçon. Épouse d’un riche industriel, elle voit sa vie passer sans que rien ne la traverse, sauf les leçons de piano le vendredi pour le gamin. Un jour, pendant que le petit joue ses gammes, elle assiste à la mort d’une femme dans la rue. Un crime passionnel, et l’histoire, ou plutôt l’attente peut commencer. Anne va chercher à comprendre pourquoi l’homme qui l’aimait l’a tuée. Pour en savoir plus, elle se met à fréquenter un café et un homme en particulier. Les regards sur eux se posent. La ville est petite… Commencent alors d’étranges échanges entre cette femme et cet homme qu’elle pourrait aimer, un peu, en parlant, en avalant du vin, toujours plus…


Le livre a été porté à l’écran par Peter brook. On voit Belmondo et Jeanne Moreau attablés au café, on voit leurs silences, leurs mains qui se frôlent et toutes ces questions auxquelles ils ne répondent pas toujours mais, il faut bien le dire (et ceux qui ont lu « l’Amant » avant de voir le film comprendront), aucun cinéaste n’est jamais parvenu à filmer ce que Marguerite Duras a écrit. Là était sûrement son génie : écrire l’invisible.

À noter aussi que, dès sa sortie, ce court roman a été porté aux nues par les critiques, même si quelques chroniqueurs n’y ont toutefois vu qu’un exercice de style au service du nouveau roman. Quoi qu’il en soit aucune Anna Gavalda, aucune Claudy Gallay n’égalera jamais le talent de Duras quand « elle enferme dans des palais de solitude des personnages qui n’ont que l’ennui comme compagnon », l’ennui, celui fait d’instants immobiles. L’ennui chez Duras, c’est une machine à rêves, juste une machine à rêves… J’aime bien, tellement !

Page 28 ?
Non, Marguerite Duras, on ne peut apprécier ses textes que dans leur intégralité. (Les connaisseurs comprendront…)

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